Vers adressés à Diane de Poitiers
Plus ferme foi ne fut oncques jurée
A nouveau prince, ô ma belle princesse,
Que mon amour qui vous sera sans cesse
Contre le temps et la mort assurée.
De fossés creux ou de tour bien murée
N'a pas besoin de ma foi la fortresse,
Dont je vous fis, dame, reine et maîtresse,
Parce qu'elle est d'éternelle durée.
Trésor ne peut sur elle être vainqueur
Un si vil prix n'acquiert un gentil coeur.
Ton esprit est, Ronsard,...
Ton esprit est, Ronsard, plus gaillard que le mien ;
Mais mon corps est plus jeune et plus fort que le tien ;
Par ainsi je conclus qu'en savoir tu me passe
D'autant que mon printemps tes cheveux gris efface.
L'art de faire des vers, dût-on s'en indigner,
Doit être à plus haut prix que celui de régner.
Tous deux également nous portons des couronnes
Mais, roi, je la reçus ; poète, tu la donnes.
Ton esprit enflammé d'une céleste ardeur
Éclate par soi-même, et moi par ma grandeur.
Si du côté des Dieux je cherche l'avantage,
Ronsard est leur mignon et je suis leur image.
Ta lyre, qui ravit par de si doux accords,
Te soumet les esprits dont je n'ai que les corps ;
Elle s'en rend le maître et te fait introduire
Où le plus fier tyran n'a jamais eu d'empire,
Elle amollit les coeurs et soumet la beauté :
Je puis donner la mort, toi l'immortalité